Proportions et demi-mesure

Avant-propos

Nous avions originellement préparé un court article qui devait illustrer de façon pertinente et accessible le sujet des proportions. Pour beaucoup c’est une question complexe à appréhender et nous vous invitons, si ce n’est pas déjà fait, à lire notre série “la bonne coupe” en particulier les articles : La Bonne Coupe 4 – La veste : cintrage, longueur et montage, La Bonne Coupe 2 et 3 sur le pantalon qui complètent parfaitement ce que nous allons aborder ici. Il se trouve que l’on nous a également récemment demandé ce que nous pensions de la marque Lanieri et nous avons pensé qu’il était intéressant d’intégrer notre avis à cet article sur les proportions.

Nous allons commencer par présenter rapidement Lanieri et par ailleurs nous illustrerons quelques principes sur les proportions. Nous commenterons ensuite plusieurs tenues de clients Lanieri et pour conclure le propos nous comparerons ces tenues à celles d’autres marques de demi-mesure.

Présentation de Lanieri

Nous avions déjà dit en commentaire de notre article sur l’entretien des souliers “qu’en ce qui [nous] concerne Lanieri est une énième start-up bénie des “Dieux” qui prétendait faire de la magie et qui au final délivre un produit cher et raté. C’est même un cas d’école.” Un lecteur nous a demandé de développer, alors développons. Lanieri est une start-up italienne fondée aux alentours de 2011 par Simone Maggi et Riccardo Schiavotto, deux titulaires d’un MBA du Collège des ingénieurs, formation prestigieuse s’il en est puisqu’Élisabeth Bor(g)ne a la même. Pour ceux qui l’ignorent le MBA du Collège des ingénieurs est une formation de type école de commerce destinées aux jeunes ingénieurs et scientifiques qui souhaitent acquérir des connaissances sur le fabuleux monde du business.

À partir de 2015 Lanieri commence à se développer hors d’Italie et leur stratégie n’est pas d’une grande originalité puisqu’elle consiste à graisser la patte à tous les influenceurs du milieu. À cette époque pour vous faire une idée du budget marketing d’une marque sur le marché Français vous pouvez utiliser l’échelle Jaco. L’échelle Jaco est un instrument de mesure scientifique simple à utiliser, vous tapez le nom d’une marque sur le blog de Jaco et selon le nombre de résultats vous avez une idée de son niveau de compromission. En même temps, Lanieri c’est Italien, ils savent que pour réussir mieux vaut payer la mafia (de l’influence) plutôt que la combattre.

À l’époque l’offre de demi-mesure en ligne est relativement limitée mais elle n’est pas inexistante, loin de là. Pour se démarquer Lanieri a une arme redoutable, un algorithme top secret développé spécialement pour eux en collaboration avec la Nasa afin d’avoir le fit le plus parfait trop bien qu’il est génial. On déconne un peu mais pas tant que ça. Faites une recherche algorithme et Lanieri dans Google et amusez-vous bien. Certains articles déconnent d’ailleurs bien plus que nous et Le Point parle carrément de “néotailleur 3.0”. Le 2.0 c’est déjà dépassé bande de ploucs, Lanieri ils sont dans le futur. Je vous laisse d’ailleurs faire le tour des nombreux articles totalement dithyrambiques maniant l’hyperbole et pas du tout rémunérés sur la marque qui circulent un peu partout, nous, nous allons jeter un coup d’œil du côté de l’algorithme magique.

Une histoire de ratios

Avant de nous attarder sur les mises de clients Lanieri jetons tout d’abord un coup d’œil à ces trois tenues qui ne sont pas de la marque et sont très intéressantes. Elles sont pleines d’enseignements car bien qu’elles soient construites autour de la même idée la différence de coupe est flagrante. Observez les biens.

Source: Instagram
Source: Instagram

Ligne rouge: ligne de boutonnage
Ligne orange: ligne de taille / ceinture

Sur la photo de gauche, on peut voir que la ligne de boutonnage coïncide avec celle de la ceinture ce qui est la bonne proportion à adopter.
À l'inverse, sur les deux autres, l'écart est patent et signe un PAP de mauvaise coupe (les vendeurs vous diront qu'il s'agit d'une coupe moderne).

Ligne rose: ligne de poche
Ligne bleu clair: ligne du bouton inférieur

Sur la photo de gauche, le bouton inférieur est situé trop bas par rapport à la ligne de poche. La bonne proportion est en revanche respectée sur les deux photos de droite. Le principe de l’alignement du bouton inférieur avec la ligne de poche remonte aux années 30/40 et est plus harmonieux qu'un boutonnage placé trop haut ou trop bas.

Ligne jaune: Sauf effet de style, le revers doit plus ou moins se situer à équidistance des deux points de l'épaule (acromion et col).
Ligne blanche: La veste doit être séparée en deux partie de même taille. La première moitié de l'épaule au bouton actif, la seconde du bouton actif au bas de la veste.

Les proportions sont respectées à gauche et à droite mais comme le bouton à droite est trop haut, la veste se retrouve trop courte.

Observez maintenant cet exemple de costume droit bien coupé et proportionné dans différents styles (anglais, milanais, parisien)

Source: Tumblr
Source: Tumblr

Un exemple similaire mais pour un croisé. Les poches sont bien au niveau du boutonnage, inutile donc de nous dire que c'est impossible sous prétexte que vous ne voyez que des croisés ratés toute la journée.

Source: Tumblr
Source: Tumblr

Pro-mesure et demi-portion

Maintenant que vous avez bien observé ces photos nous allons passer à celles des tenues Lanieri. Si vous en avez besoin nous vous recommandons encore une fois de vous référer à nos articles de la série “la bonne coupe” afin de bien comprendre les observations qui sont faites.
Il est également important de comprendre que notre propos concerne ici Lanieri car on nous a explicitement demandé notre avis sur la marque, mais il est en réalité applicable à pratiquement toutes les marques de demi-mesure. Certes, certaines vont vous permettre de réaliser des vêtements d’essais etc etc, mais les problèmes de coupe sont légion dans ce marché, pour le prouver nous allons également inclure d’autres fabricants en fin d’article.

Les tenues ont été sélectionnées au hasard et proviennent toutes de réseaux sociaux en lien avec le monde Sartorial, donc de gens qui ont théoriquement plus de connaissances sur le sujet qu’un client lambda. Elles datent toutes de périodes différentes allant de 2015 à 2022 et appartiennent soit à des clients payants, soit à des influenceurs qui ont reçu leur produit “à titre gracieux”. Certaines mises ont été réalisées en boutique, d’autres en ligne.

Source: Discord
Source: Discord

La position des bras fausse l'analyse de l'épaule mais je pense que la pose est volontaire pour camoufler un défaut que l'on devine malgré tout. Sur l'épaule droite on distingue un renfoncement entre la cigarette et le deltoïde alors que ce renfoncement devrait être absent.

Passons sur les revers trop larges façon proxénète de second rang dans une production de la blaxploitation pour nous intéresser à la position des boutons : le dernier bouton n'est pas aligné avec les poches, il y a un problème de patronage. La veste aurait dû être bien plus longue vu la position des boutons. Soit le patronage était mauvais dès le début, soit le client est de petite taille et une adaptation malheureuse a été tentée pour raccourcir la veste de 3 ou 4cm en compressant les proportions du bas vu que les poches sont artificiellement remontées.

Axes d'amélioration possibles : rallonger la veste pour faire descendre les poches. Baisser le cran, bien trop haut pour cette hauteur de boutonnage.

L'arrière du pantalon n'est pas très propre. Le pantalon gagnerait à avoir plus d'ampleur, malgré une cuisse qu'on devine assez fine, vu qu'il semble heurter le mollet. Le client semble aussi passer beaucoup de temps assis (étudiant ou profession de bureau) ce qui entraîne une mauvaise posture au niveau du bassin et un pantalon qui plaque contre les ischios jambiers.

Axes d'amélioration possibles : Faire plus ample, remonter l'arrière du pantalon en pinçant le tissu dans la ceinture.

Source: Discord
Source: Discord

La pose rend difficile l’examen de la veste mais la ligne d'épaule manque clairement de netteté. Normalement on constate cette déformation uniquement en position assise. Le client doit avoir une cyphose non prise en compte par le "tailleur". L'état du pantalon qui tiraille de partout confirme un problème de posture non pris en compte (particulièrement flagrant juste à la naissance des ischio-jambiers). Si vous souhaitez un pantalon qui casse proprement, un minimum d'ampleur est nécessaire.

Axes d’amélioration possibles: tout.

Source: Discord
Source: Discord

Le client a une épaule plus haute que l'autre mais ça n'a pas été pris en compte par le “tailleur”. Cela se remarque car le bouton n'est pas aligné avec la boutonnière.
On remarque également que la manche gauche essuie des contraintes techniques assez fortes comparé à la droite. Le client doit passer beaucoup de temps assis à manipuler une souris d'ordinateur et doit avoir le torse qui vrille légèrement vers l'intérieur en plus de son épaule plus haute que l'autre.

Axes d’amélioration possibles: démonter et remonter les manches pour en modifier l'aplomb.

La veste souffre du même problème de patronage que d’habitude : le dernier bouton n'est pas aligné avec les poches. Difficile de savoir si le patronage était foireux ab initio ou s'il s'agit d'une adaptation pour un client de petite taille.

Source: depiedencap
Source: depiedencap

Je ne sais pas comment l'employé n'a pas pu constater le collar gap. L'aplomb des manches est catastrophique car la morphologie du client n'a pas été prise en compte. Le bouton actif est placé démesurément haut (imaginez qu'il s'agit de son nombril). Le pantalon devrait presque doubler de volume pour que le rendu soit correct.

Axes d'amélioration possibles : tout (excepté le bouton inférieur qui est au bon niveau des poches pour une fois).

Source: depiedencap
Source: depiedencap

Client manifestement très petit. Le patronage a été modifié mais d'une façon excessive car la veste est bien trop courte, la faute à un boutonnage actif remonté bien trop haut.
Le pantalon a une taille trop basse. Le client doit avoir un bassin très large et qui a été pris en compte en donnant beaucoup de bassin et de cuisse au pantalon. Le résultat est peu convaincant car le pantalon devient trop ajusté au niveau du genoux ce qui créé une sorte de goulot d’étranglement. La cuisse trop ample et le mollet trop fin donnent ce résultat au niveau de l'arrière de la cuisse.
La pose ne permet pas de juger le reste d'une façon très fidèle.

Axes d'amélioration possibles : tout.

Source: depiedencap
Source: depiedencap

Il n'y a pas grand-chose à dire si ce n'est que le costume est bien trop ajusté. Cependant, on peut faire remarquer l'absence totale de talon de manche.

Axes d'amélioration possibles : tout

Source: depiedencap
Source: depiedencap

Encore cette satanée disproportion au niveau des poches ! Inutile d'examiner le reste, passons au suivant.

Source: effortlessgent
Source: effortlessgent

La fente est haute, ce qui est un bon point (mieux que SuitSupply sur ce coup).
Le bouton actif est trop haut pour que le cintrage soit idéal. La poitrine devient petite alors que l'intérêt du croisé est de la dégager.
La zone entre la poitrine et l'épaule fait PAP bas de gamme : l'emmanchure semble très basse. Alors que la poitrine devrait être légèrement creuse, on trouve un embu difficilement explicable près de l'épaule (cf photo 2). Le deltoïde est moulé (cf photo 1) et l'arrière de la manche vient s'écraser contre le triceps (dernière photo) sans doute en raison de l'ajustement trop poussé de la manche et d'une posture non prise en compte.

La tenue date de 2015. Elle est plus ancienne que les photos ci-dessus où le montage de l'épaule parait plus qualitatif. Est-ce qu'il y a eu un changement de patronage et/ou atelier ?

Source: jamaisvulgaire
Source: jamaisvulgaire

Passons sur les goûts douteux du bonhomme en matière d'ampleur du pantalon et de chaussettes pour nous intéresser à la ligne d'épaule qui manque cruellement de netteté (assez classique sur ce genre de croisé en demi-mesure) ainsi qu'à la disproportion entre les poches et les boutons. Ces détails n’auraient pas dû échapper à l'œil expert de l'intéressé mais il était sans doute fatigué de lutter contre un col aussi rigide en tentant des postures improbables (à moins qu'il ne s'agisse d'un simple collar gap).

Source: misiuacademy
Source: misiuacademy

Le même problème que d'habitude : la position du bassin du client n'est pas prise en compte, le pantalon est plaqué sur les ischios. L'épaule manque de netteté (particulièrement visible à droite). L'aplomb de la manche est mauvais (sans doute car la posture naturelle du client n'est pas prise en compte). Si on regarde attentivement, on peut voir que le col plaque mal du côté droit. 

Source: misiuacademy
Source: misiuacademy

Le mauvais aplomb se vérifie. La jupe du croisé plaque mal sur le pantalon. Les défauts du pantalon préalablement identifiés se vérifient.
Encore et toujours la disproportion au niveau des poches…

Source: blog styleforum
Source: blog styleforum

Le résultat le plus convaincant jusqu'ici. Dans l'ensemble, il n'y a pas de défaut criant mais on peut constater un manque de netteté dans la ligne d'épaule. La construction de l'épaule et du plexus signe une production industrielle mais ce n'est pas en soit un défaut.

Nous avons maintenant un client qui déçu de sa commande a fait refaire le pantalon par Lanieri et qui a fait retoucher la veste par un tiers comme cela est proposé par les conditions de vente de la marque. Nous proposons donc un avant/après.

Avant :

Source: peaklapel
Source: peaklapel

Le col est trop large. L'aplomb des manches est mauvais faute d'avoir pris en compte la posture du client.
La jupe ne colle pas au pantalon.

Après :

Source: peaklapel
Source: peaklapel

Le col a été ajusté. La jupe colle au pantalon, c'est mieux.

Source: peaklapel
Source: peaklapel

L'aplomb des manche a été corrigé mais ce n'est pas encore ça, faute d'une ampleur nécessaire et d'une mauvaise emmanchure. On peut cependant remarquer que le pan du croisé plaque mal, certainement en raison du mauvais cintrage (particulièrement flagrant au niveau du bas du dos). Le patronage a été mal adapté au gabarit du client.

Source: peaklapel
Source: peaklapel

Les défauts sont particulièrement criants. Le dos manque de netteté. Le pantalon est plaqué contre les ischios. Le deltoïde est visible.

Même principe, sauf qu’ici le client a demandé à Lanieri de refaire la veste et a fait retoucher le pantalon par un retoucheur.

Avant :

Source: styleforum
Source: styleforum

Les manches et le pantalon sont certes trop long mais c'est normal à la livraison d'un costume. Le problème réside encore et toujours dans le mauvais aplomb des manches (vous en connaissez la raison) ainsi que la disproportion de la veste (visible par rapport aux poches). Le client semble avoir un important passé sportif car ses épaules sont basses, la poitrine ainsi que le dos sont développés mais la taille reste fine. Le pantalon est d'une ampleur correcte et il ne souffre d'aucun problème postural ou d'un mollet excessivement en arrière comparé aux précédents exemples vu que le pantalon tombe parfaitement droit à l'arrière.

Malheureusement, l'adaptation du costume à ce gabarit assez particulier n'est pas très heureuse. De dos, les trapèzes ressortent excessivement et ruinent la ligne d'épaule. Les dorsaux manquent d'aisance.

Axes d’amélioration : Relâcher le dos et reprendre la poitrine (possiblement au moyen d'une pince sous le revers). Le cintrage peut également légèrement être détendu afin de limiter la compression des dorsaux. Il faut aussi redonner de l'ampleur à la manche et en modifier l'aplomb (les épaules semblent en avant).

Source: styleforum
Source: styleforum

Le souhait du client a manifestement été de faire ajuster le pantalon. Le pantalon tombe moins bien mais il est désormais prêt à rejoindre les tirailleurs si jamais la France se décidait à reformer son empire colonial.

Le boutonnage est toujours trop haut, la taille trop basse. Les poches décalées par rapport aux boutons. Le dos n'a pas été assez libéré mais le cintrage a été suffisamment détendu (le résultat fait moins cartoon). Il y a toujours un problème de poitrine. Au lieu de donner de l'ampleur à la manche, celle-ci a été réduite au point de comprimer le biceps mais on peut mettre ça sur la faute du client

Source: Instagram
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Jetons maintenant un coup d’œil au vendeur Lanieri de gauche : la proportion est bonne (cf la poche qui ne remonte pas plus haut que le bouton). La ligne d'épaule est nette. La manche a assez de volume pour laisser le bras s'exprimer. Le pantalon est également assez propre. Les revers cassent un peu, sans doute en raison d'un excès de développement des pectoraux. Une pince placée sous le revers serait tout indiqué pour y remédier. Le seul défaut vraiment dirimant de la veste est que la jupe ne colle pas au pantalon, peut-être en raison de la position des bras.

Source: Instagram
Source: Instagram

Passons maintenant au “client” (vous pouvez également utiliser la photo précédente). La ligne d'épaule manque de netteté ainsi que la ligne de manche (côté gauche). La zone de boutonnage n'est pas très propre mais cela reste acceptable. En revanche, les poches remontent trop haut.

Et les autres marques de demi-mesure alors?

Scavini

Comparons avec une demi-mesure Scavini, toujours sur un croisé et sur la même personne :

Source: Instagram
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La ligne d'épaule est bien plus nette mais on distingue un léger collar gap.
La veste est disproportionnée : la ligne de boutonnage a été remontée trop haut (possiblement pour raccourcir la veste sur demande du “client” ? à moins que le patronage soit déjà ainsi. Quoi qu'il en soit, les poches remontent trop haut)

Source: Instagram
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Le collar gap se voit un peu mieux ici le pantalon est trop ajusté mais c'est sans doute un choix du “client”.

Source: Instagram
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Le résultat laisse songeur... le costume semble avoir été déglingué par un pressing ou un
Mauvais pliage lors d'un transport en avion/train. 

Source: Instagram
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Le bouton actif côté gauche a certainement été déplacé par le tailleur lors de l'essayage final mais la couture n'est pas très propre car on voit les différents fils derrière le bouton.

Clotilde Rano

Clotilde Rano a pris soin de recourir à un expert pour présenter son travail.

Source: jamaisvulgaire
Source: jamaisvulgaire

Cette fois, pas de bras levé ou de main dans la poche pour cacher une mauvaise coupe.
Si la ligne d'épaule est assez nette, on peut s'interroger sur l'aplomb des manches qui tirebouchonnent de tous les côtés.
Le cintrage n'est pas forcément très réussi alors même que le "mannequin" est assez longiligne.
Le problème principal est le patronage qui semble dessiné pour féminiser la silhouette. La majorité des hommes ont besoin d'une compensation de carrure mais la "mode" de cette dernière décennie a été aux vestes qui gomment les caractéristiques sexuelles secondaires. La veste se retrouve étriquée pour faire un torse d'enfant (plat et sans épaule) au lieu de donner du coffre et de la carrure, et la longueur de la veste est diminuée afin de conserver une certaine harmonie dans l'horreur (faute d’élargir la carrure, il faut raccourcir la veste sous peine d'avoir un énorme rectangle en guise de veste).

Le pantalon souffre des mêmes problèmes que les tenues déjà identifiées comme ratées. Sans doute en raison d'une mauvaise posture non prise en compte.

Source: jamaisvulgaire
Source: jamaisvulgaire

Un effort a été fait sur l'alignement des motifs (cf col / pointrine / manche). Si vous avez mauvais goût et que vous commandez un costume avec des gros carreaux, soyez attentifs à ce que les motifs soient bien alignés.

Howard's

Howard's, plus modeste, se contente de poster des photos avec ses clients :

Source: Instagram
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Les proportions sont respectées, le travail est plutôt propre (pas de plis de tensions ignobles comme sur d'autres tenues vues précédemment). Par contre, les épaules sont ratées : La cigarette est trop prononcée (on retrouve des cigarettes identiques chez Ardentes Clipei, les deux marques recourent peut-être au même atelier) et il y a un renfoncement bien excessif entre la cigarette et le deltoïde du jeune homme.

Gardons-nous de trop critiquer la tenue de ce client, vu la taille des revers il serait susceptible de nous percuter avec sa Cadillac Deville 1964 intérieur panthère avant de nous achever à coup de bottines à talons.

Source: Instagram
Source: Instagram

Même problème ici.

Source: Instagram
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Collar gap, veste disproportionnée, etc. Bref, inutile de continuer.

Maison Pen

Autant il est possible de trouver des costumes plutôt réussis :

Source: Instagram
Source: Instagram

Autant d'autres ont eu moins de chance:

Source: depiedencap
Source: depiedencap
Source: depiedencap
Source: depiedencap

Sans commentaire....

Conclusion

En conclusion, le résultat apparait en général peu convaincant et ce peu importe la marque. In fine, tout se vaut peu ou prou car les tendances dégagées pour Lanieri se retrouvent dans les autres offres de demi-mesure. 

Tout d’abord beaucoup de costumes ont des problèmes de patronage qui ne sont pas liés au goût du client (que le client souhaite un costume étriqué ne change rien au fait que les boutons ne soient pas alignés sur les poches par exemple). Par ailleurs la posture des clients n'est souvent pas prise en compte (particulièrement visible pour les manches et l'arrière du pantalon). Soit les clients sont tous des autistes incapables de comprendre les consignes pour un essayage (adopter une posture naturelle, signaler quand quelque chose ne va pas car le vendeur peut avoir l'esprit ailleurs ou courir entre différents rendez-vous), soit les "conseillers" / "tailleurs" ont de la merde dans les yeux et sont tout juste capable de prendre des mesures sans adapter les patrons aux clients.

Ensuite, les marques tentent parfois de se distinguer suivant leur lieu de production. Je doute que la localisation de l'atelier (Portugal, Roumanie, Italie) change quoi que ce soit sur un plan esthétique car le résultat fait toujours industriel (absence de talon de manche par exemple). Peut-être que si c'est "made in italy" ça rassure le plouc alors que le produit terminé ressemble comme deux gouttes d'eau a un produit roumain ou chinois. La différence de prix étant sans doute plus justifiée par les meilleurs salaires des ouvriers dans tel ou tel bled plutôt qu'un savoir-faire technique particulier. L'autre différence de prix peut provenir de la qualité des matériaux employés (par exemple la qualité de la thermocolle pour votre entoilage industriel, nous abordons déjà le sujet de l’arnaque qu’est le semi entoilage industriel ici et ) ou l'amortissement des machines. Produire dans un pays où la main d'œuvre est chère n'a de sens que si techniquement le produit est mieux réalisé. Optez pour un atelier pour son savoir-faire plutôt que sur sa localisation. Pour simplifier, je préfère du fait main en Chine que du fait machine en Italie. Et surtout demandez à comparer les produits issus de différents ateliers, nombreux sont les ateliers à proposer du "fatto a mano" de piètre qualité (mieux vaut du fait machine dans ce cas, ce sera moins cher pour un résultat identique) et les vendeurs qui font passer des défauts pour des signes de qualité (très courant avec les boutonnières réalisées de travers, le point baguette irrégulier etc).

La Bonne Coupe 2 – Le pantalon : hauteur (taille haute / basse)

Remonte ton froc

Le pantalon est une pièce déterminante car il définit complètement le style d’une tenue. Une forme inadaptée fait directement sortir du registre recherché. Dans les épisodes qui arrivent on va traiter les différents aspects de sa coupe et pointer du doigt les problèmes récurrents. Commençons tout de suite avec cet article consacré à la hauteur du pantalon.

J’entends beaucoup de personnes aujourd’hui dire que les tailles hautes sont dépassées. Il faut avouer qu’on a grandi dans un culte des tailles basses impressionnant. Je me souviens encore de cette période où porter un pantalon à ras du fion en laissant dépasser son caleçon rose fluo était considéré comme cool.
Difficile de dire comment on est arrivés à un tel point. La démocratisation du jeans a probablement poussé à une mode généralisée des tailles basse qui a ensuite été maintenue pour ses avantages en terme de coût. S’il existe une clientèle prête à acheter de la merde autant produire des demi-pantalons en tissu synthétique.
Même si ces dernières années les tailles ont eu tendance à remonter légèrement on voit encore souvent des catastrophes dans les ensembles « classiques ». Le pantalon a un impact important sur la silhouette et trop bas il pourrit complètement le rendu d’une tenue.

Il faut savoir pour commencer que le mot « taille haute » est dévoyé aujourd’hui. La mode masculine est tellement aux tailles basses qu’un pantalon qui ne laisse pas la raie du cul apparente façon plombier est déjà considéré comme « taille haute ». La vraie taille haute dans le jargon sartorial s’arrête – attention surprise – sur le haut de la taille, au dessus du nombril, sous les côtes, à la base du « V » des grands dorsaux.

A gauche, le montant du pantalon est très long, la ceinture remonte au-dessus du deuxième bouton de la veste, on se rapproche ici d'une véritable taille haute au sens technique. A droite cependant, observez le placement de la ceinture par rapport au ceintrage et au boutonnage de la veste : il s’agit clairement d’une taille basse.
A gauche, le montant du pantalon est très long, la ceinture remonte au-dessus du deuxième bouton de la veste, on se rapproche ici d'une véritable taille haute au sens technique. A droite cependant, observez le placement de la ceinture par rapport au ceintrage et au boutonnage de la veste : il s’agit clairement d’une taille basse.

Etant donné que les tailles classiques sont systématiquement plus hautes que les tailles modernes, il peut quand même être pertinent de parler de « tailles hautes » en opposition aux « tailles basses » proposées par la grande majorité du prêt-à-porter. Pour éviter à vos esprits un trop gros choc conceptuel en cette période d’élections et de vulgarisation à outrance je vais conserver cette terminologie simple.

Une belle illustration de l’ami Julien Scavini alias Stiff-Collar qui résume le tout. La taille classique/naturelle basse indiquée sur le dessin peut être considérée comme la limite basse de ce qu’on appelle vulgairement aujourd’hui les « tailles hautes ». Bien sûr en fonction des morphologies ces points de référence varient légèrement.
Une belle illustration de l’ami Julien Scavini alias Stiff-Collar qui résume le tout. La taille classique/naturelle basse indiquée sur le dessin peut être considérée comme la limite basse de ce qu’on appelle vulgairement aujourd’hui les « tailles hautes ». Bien sûr en fonction des morphologies ces points de référence varient légèrement.

Après cette parenthèse technique entrons dans le vif du sujet : les tailles basses, c’est de la merde.

Une seule situation justifie pour moi le port d’une taille basse : lorsqu’il s’agit de mettre le corps en valeur en dévoilant le ventre. Le vêtement est dans ce cas moins utilisé dans une optique de structure que pour éviter l’attentat à la pudeur.

C’est classique chez les femmes de montrer un peu de chair quand le temps se réchauffe pour <del>exciter le mâle</del> se sentir plus à l’aise.
C’est classique chez les femmes de montrer un peu de chair quand le temps se réchauffe pour exciter le mâle se sentir plus à l’aise.
Pour les hommes on pense au classique short de plage taille basse qui permet d’exhiber les abdos et la fameuse « ceinture d’apollon ». Dans ces cas on cherche simplement à se dénuder le plus possible.
Pour les hommes on pense au classique short de plage taille basse qui permet d’exhiber les abdos et la fameuse « ceinture d’apollon ». Dans ces cas on cherche simplement à se dénuder le plus possible.

Hors des situations estivales les vêtements recouvrent le corps et l’enjeu est de reformer une silhouette harmonieuse. En porter dans une tenue classique donne alors un résultat catastrophique.

Les problèmes concernent d’abord la structure-même de la silhouette : les tailles basses abaissent la ligne de taille sous un point qui est situé en-dessous de la zone de la taille anatomique.
La taille est un repère visuel important car c’est l’endroit le plus étroit du corps. Elle peut être complètement masquée par l’amplitude des vêtements contrairement aux parties larges comme les épaules qui les supportent. De manière classique on se sert d’un marquage (cintrage, gilet, ceinture du pantalon, etc) pour diviser les silhouettes en une portion haute et une portion basse à partir de la taille.

Cocteau dans sa tenue d’académicien : notez comme la silhouette est littéralement coupée en deux à partir de la taille.
Cocteau dans sa tenue d’académicien : notez comme la silhouette est littéralement coupée en deux à partir de la taille.
Tenue cérémonielle avec queue-de-pie et gilet croisé. Encore ici on peut discerner deux « blocs », des formes clairement distinctes.
Tenue cérémonielle avec queue-de-pie et gilet croisé. Encore ici on peut discerner deux « blocs », des formes clairement distinctes.
Avec une veste fermée le cintrage marque la base du « V » du torse. La « jupe » de la veste quant à elle est correctement plaquée contre les hanches pour garder une continuité avec la ligne de jambes. 
Le principe est le même avec les manteaux, c’est pour ça que bien coupés on peut tout à fait les porter longs et fermés sans avoir l’air d’un nain<a href="https://www.sartorialisme.com/guide-manteau-hiver-sartorial/">
(cf. notre article sur les manteaux).</a>
Avec une veste fermée le cintrage marque la base du « V » du torse. La « jupe » de la veste quant à elle est correctement plaquée contre les hanches pour garder une continuité avec la ligne de jambes. Le principe est le même avec les manteaux, c’est pour ça que bien coupés on peut tout à fait les porter longs et fermés sans avoir l’air d’un nain (cf. notre article sur les manteaux).
Sur cette tenue par contre impossible de discerner la ligne de taille.
Sur cette tenue par contre impossible de discerner la ligne de taille.

Une taille marquée contraste avec les parties larges du dessous et du dessus, retrace les angles du corps et met en valeur les caractères sexuels secondaires. Sur des morphologies standard d’homme et de femme ça se traduit respectivement par un torse en V et une plongée de bassin accentués.

Une ceinture très épaisse qui marque la taille de haut en bas : le pantalon encadre complètement les dorsaux et épaules pour une forme en V accentuée.
Une ceinture très épaisse qui marque la taille de haut en bas : le pantalon encadre complètement les dorsaux et épaules pour une forme en V accentuée.
Chez les femmes la taille marquée accentue le ratio hanches/taille en général élevé. C’est comme ça qu’elles vous maraboutent avec leur taille haute H&M en polyplouc.
Chez les femmes la taille marquée accentue le ratio hanches/taille en général élevé. C’est comme ça qu’elles vous maraboutent avec leur taille haute H&M en polyplouc.
Une taille marquée peut à contrario renforcer une allure androgyne chez une femme étroite de bassin et féminiser un <del>gros lâche</del> homme sans carrure. On peut corriger le premier cas avec des coupes amples plus féminines (proches des jupes en fait), et le second avec des vestes au montage épaule structuré.
Une taille marquée peut à contrario renforcer une allure androgyne chez une femme étroite de bassin et féminiser un gros lâche homme sans carrure. On peut corriger le premier cas avec des coupes amples plus féminines (proches des jupes en fait), et le second avec des vestes au montage épaule structuré.

En marquant un endroit plus large que la taille naturelle, les tailles basses gomment les angles du corps. Elles donnent en général des silhouettes plates et peu structurées assez caractéristiques.

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A gauche on voit bien que le polo ne peut pas correctement épouser la silhouette à cause de la taille trop basse. Un léger ajustement et le rendu est complètement différent.
A gauche on voit bien que le polo ne peut pas correctement épouser la silhouette à cause de la taille trop basse. Un léger ajustement et le rendu est complètement différent.
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Si on rajoute le port d’une veste la ligne du pantalon dépasse sous le boutonnage. On a alors un travail digne des plus grands écarteleurs du Moyen-âge puisque la silhouette est étirée en son milieu sur 30cm.
Le cintrage de la veste et la ceinture du pantalon situés à des niveaux différents créent un double-marquage. On a l’impression que la silhouette n’est plus divisée en deux mais en trois, avec un haut, un bas et une partie intermédiaire qui n’a rien à foutre là.

Voici schématiquement ce que l'inconscient perçoit. Le cintrage marque la taille en un point haut et la ceinture du pantalon qui dépasse sous la veste la marque en un point bas. Rappelez-vous de la structure en deux blocs dont je parlais plus haut : elle est brisée puisqu'une troisième partie intermédiaire apparait entre ces deux marquages.
Voici schématiquement ce que l'inconscient perçoit. Le cintrage marque la taille en un point haut et la ceinture du pantalon qui dépasse sous la veste la marque en un point bas. Rappelez-vous de la structure en deux blocs dont je parlais plus haut : elle est brisée puisqu'une troisième partie intermédiaire apparait entre ces deux marquages.
Bien sûr avec les coupes rase-pet le résultat est encore pire. On doit dans ce cas remonter le cintrage et la taille est encadrée sans être marquée : une structure que l'on peut retrouver chez la femme mais pas chez l'homme.
Bien sûr avec les coupes rase-pet le résultat est encore pire. On doit dans ce cas remonter le cintrage et la taille est encadrée sans être marquée : une structure que l'on peut retrouver chez la femme mais pas chez l'homme.
Ici on voit que la ceinture du pantalon accompagne logiquement le cintrage de la veste.  Source : Anglo-Italian
Ici on voit que la ceinture du pantalon accompagne logiquement le cintrage de la veste. Source : Anglo-Italian

Les tailles basses en abaissant la longueur perçue des jambes tassent aussi plus facilement les silhouettes. A l’inverse les tailles hautes sont connues pour les allonger en donnant l’illusion de jambes plus grandes.
En fait les tailles hautes « élancent » plutôt la silhouette, c’est-à-dire qu’elles donnent une stature, une hauteur aux éléments principaux du corps qui sont le torse et la tête. Il faut penser au fonctionnement d’un piédestal : mettez une jolie statue sur une colonne de trois mètres et elle parait majestueuse ; foutez-la sur un vieux socle en pierre à quelques centimètres du sol et elle est juste bonne à servir d’éponge-pisse aux clodos et étudiants du coin.

La différence de taille est énorme mais les silhouettes sont fondamentalement construites de la même façon. On aurait plus tendance à remarquer la grandeur du type de droite que la petitesse du type de gauche.
La différence de taille est énorme mais les silhouettes sont fondamentalement construites de la même façon. On aurait plus tendance à remarquer la grandeur du type de droite que la petitesse du type de gauche.

On peut lire parfois que ces jambes allongées raccourcissent trop le torse et créent un déséquilibre de proportions entre le haut et le bas de la tenue. Cette idée que haut et le bas devraient obligatoirement avoir la même longueur pour un résultat équilibré est complètement stupide. Le pantalon a un tel impact sur les proportions horizontales (taille et carrure) que chercher l’équilibre sur les proportions verticales (longueur des vêtements), par exemple en ayant ce rapport pantalon-chemise 50/50, est complètement désavantageux.
Rien n’empêche de moduler légèrement la hauteur du pantalon en fonction du port envisagé.

Certains seraient capables de dire que la silhouette est plus équilibrée à droite qu’à gauche.
Certains seraient capables de dire que la silhouette est plus équilibrée à droite qu’à gauche.
Vous verrez souvent des types comme Andreas Weinas adapter légèrement la hauteur de leur pantalon en fonction du port envisagé. Les ensembles plus formels (e.g. costumes ou dépareillés foncés) s’accommodent facilement des tailles hautes.
Vous verrez souvent des types comme Andreas Weinas adapter légèrement la hauteur de leur pantalon en fonction du port envisagé. Les ensembles plus formels (e.g. costumes ou dépareillés foncés) s’accommodent facilement des tailles hautes.
On peut par contre prévoir un pantalon légèrement plus bas pour un port casual sans veste. Mais c’est plutôt le port ou non d’une veste que le degré de formalité qui va influencer le choix de la taille.
On peut par contre prévoir un pantalon légèrement plus bas pour un port casual sans veste. Mais c’est plutôt le port ou non d’une veste que le degré de formalité qui va influencer le choix de la taille.

Cette manie de raccourcir les jambes oblige par la même occasion à resserrer le pantalon pour éviter l’effet de volume (quand on dit que ça flingue les proportions horizontales). On se retrouve donc systématiquement avec des coupes foireuses.

Trop bas, un pantalon ample peut être catastrophique pour la silhouette. On sent ici les limites chez le type dont le pantalon aurait mérité d’être légèrement plus haut (et long dans le bas). Le contraste est marquant avec sa nana qui affiche des vêtements très amples sans soucis grâce à une taille naturelle très marquée.
Trop bas, un pantalon ample peut être catastrophique pour la silhouette. On sent ici les limites chez le type dont le pantalon aurait mérité d’être légèrement plus haut (et long dans le bas). Le contraste est marquant avec sa nana qui affiche des vêtements très amples sans soucis grâce à une taille naturelle très marquée.
Même bonhomme et même pantalon : on voit bien le problème d’un pantalon ample de longueur insuffisante. Le bas du corps a un aspect féminin, amplifié en plus par la coupe de la veste qui semble trop chargée en matière dans le bas.
Même bonhomme et même pantalon : on voit bien le problème d’un pantalon ample de longueur insuffisante. Le bas du corps a un aspect féminin, amplifié en plus par la coupe de la veste qui semble trop chargée en matière dans le bas.

On peut aussi lire sur certains blogs que les grands ne devraient pas porter de taille haute pour éviter un aspect trop longiligne. C’est peut-être vrai quand on porte un legging mais pas un pantalon correctement coupé. Les exemples de perches qui portent des tailles hautes sont nombreux dans le milieu.

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Ces problèmes ont encore des conséquences d'un point de vue plus fonctionnel, comme le fait de mettre le bide en évidence. L’abdomen doit être couvert en partie, un pantalon situé juste en-dessous comprime les tissus adipeux vers le haut et fait déborder le gras. Même le plus petit ventre finit avec une gueule de blobfish. Pas besoin de vous dire que laisser traîner sa pense de cette manière donne l'air avachi et vous prive de toute possibilité d'être élégant. Vous êtes relégué à la ligue du loukoum.

Pensez à faire des esquives à la Mike Tyson pour éviter de vous faire crever l’œil par un tir de bouton.
Pensez à faire des esquives à la Mike Tyson pour éviter de vous faire crever l’œil par un tir de bouton.
Pour garder une dignité rentrez votre bide dans votre pantalon comme Bruce Boyer.
Pour garder une dignité rentrez votre bide dans votre pantalon comme Bruce Boyer.

Dernier problème important qu'on peut mentionner : les tailles basses sont moins confortables. Mais j’en vois déjà certains s’agiter dans leur sarouel Tati en lisant ça donc je vais nuancer le propos.

Il y a deux manières de porter le pantalon : serré ou avec bretelles.
Serré au niveau des parties dures du bassin, un pantalon taille basse a l’avantage de ne pas comprimer le bide en position assise, mais aussi une fâcheuse tendance à tomber et créer du frottement. On évite ces problèmes avec une taille légèrement relevée, juste au-dessus des pointes de l’os iliaque. C’est la meilleure manière de porter un pantalon avec ceinture ou pattes de serrage.

Un pantalon très bien proportionné signé Ardentes Clipei. La hauteur est parfaite pour un port avec pattes de serrage.
Un pantalon très bien proportionné signé Ardentes Clipei. La hauteur est parfaite pour un port avec pattes de serrage.

Mais impossible cependant de serrer un pantalon avec une taille trop haute sans compresser totalement le ventre en position assise. Il faut donc adopter les bretelles, et c’est la manière la plus confortable de porter le pantalon puisqu’on maintient un tombé parfait dans toute position sans aucune pression excessive sur l’abdomen.

La ceinture et les pattes de serrages deviennent problématiques si le serrage est trop haut au-dessus du bassin (zone rouge). Il vaudra mieux dans ce cas adopter des bretelles.
La ceinture et les pattes de serrages deviennent problématiques si le serrage est trop haut au-dessus du bassin (zone rouge). Il vaudra mieux dans ce cas adopter des bretelles.
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Conclusion

Il est temps d’ouvrir les yeux sur les effets dégueulasses des tailles basses. Un pantalon, sans forcément être très haut, devrait au moins monter au-dessus des hanches et couvrir partiellement le ventre.
On sort d’une période du tout-slim/tout-skinny. La mode féminine qui évolue très rapidement retravaille l’amplitude et la hauteur du pantalon depuis quelques années là où les hommes sont encore dans une tendance au serré bas.

Le retour du pantalon classique chez la femme a sûrement permis de travailler une dichotomie sexuelle des silhouettes : jeans skinny taille basse pour les hommes et pantalon ample taille (très) haute pour les femmes.
Le retour du pantalon classique chez la femme a sûrement permis de travailler une dichotomie sexuelle des silhouettes : jeans skinny taille basse pour les hommes et pantalon ample taille (très) haute pour les femmes.

Si le serré est encore le standard chez nous on voit quant même qu’une porte a été ouverte et que le style sartorial s’y infiltre. Le classique pullule sur les réseaux sociaux, les gens redéveloppent leur culture, ce qui explique aussi le succès du prêt-à-porter asiatique en Occident.

Le prêt-à-porter asiatique avec son influence classique marquée propose des pantalons amples aux tailles relevées.
Le prêt-à-porter asiatique avec son influence classique marquée propose des pantalons amples aux tailles relevées.

La taille haute va vraisemblablement se démocratiser dans la décennie à venir. Je vois bien ce retour passer le pantalon gurkha qui peut plaire au plus grand nombre avec sa personnalité et sa versatilité.

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Donc arrêtez les pantalons bas avec costumes et vestes, apprenez à remonter progressivement, osez une taille qui monte jusqu’au nombril avec vos tenues casual, … bref reconsidérez sérieusement la hauteur de vos pantalons si ce n’est pas déjà fait.

Retrouvez les autres articles La Bonne Coupe

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La Bonne Coupe 3 : La fin du legging
On continue avec les pantalons en abordant cette fois le point du tombé, c'est à dire l'allure générale que prend le tissu : sa forme, son amplitude, ses plis et sa longueur.

 

La Bonne Coupe 3 – Le pantalon : forme, amplitude, plis et longueur.

La fin du legging

Après l’épisode sur la hauteur de la taille on continue avec les pantalons en abordant cette fois le point du tombé.
Qu’est-ce qu’on entend par « tombé » ? C’est l’allure générale que prend le tissu une fois porté : sa forme, son amplitude, ses plis et sa longueur.

À gauche, ce que l'on voit trop souvent, à droite, ce que l'on aimerait voir.
À gauche, ce que l'on voit trop souvent, à droite, ce que l'on aimerait voir.

Le tombé : une question de longueur avant tout

Pour un bon tombé la première idée est justement de permettre au pantalon de « tomber ». Le tissu doit pendre au lieu de s’écraser sur la chaussure en tirant la tronche, d’où l’importance de ne pas avoir un pantalon trop long.

Voilà un pantalon qui pend. Source : Spalla Korea.
Voilà un pantalon qui pend. Source : Spalla Korea.
Trop long le tissu s’affaisse sur lui-même et la jambe est déformée. Source : Flamby
Trop long le tissu s’affaisse sur lui-même et la jambe est déformée. Source : Flamby

Il est plutôt rare aujourd’hui de voir des pantalons trop longs comme c’était le cas il y a dix ans. On est passés globalement à l’extrême opposé avec des pantalons très courts qui dévoilent les chevilles, et c’est aussi vrai dans le milieu sartorial. Le second cas est mieux esthétiquement que le premier car le pantalon conserve un tombé, mais autant le trop long que le trop court tassent la silhouette.

Le pantalon trop long élargit la silhouette dans le bas alors qu’elle doit justement s’affiner à cet endroit pour conserver une projection en V. Le pantalon trop court réduit la hauteur perçue de la jambe.
Le pantalon trop long élargit la silhouette dans le bas alors qu’elle doit justement s’affiner à cet endroit pour conserver une projection en V. Le pantalon trop court réduit la hauteur perçue de la jambe.
Les crétins du Pitti se sentent subversifs en dévoilant leurs mi-bas jaunes sur 10cm alors qu’aujourd’hui certains se baladent en short et chaussettes hautes blanches Fila. Normalement la cheville se découvre qu’en position assise.
Les crétins du Pitti se sentent subversifs en dévoilant leurs mi-bas jaunes sur 10cm alors qu’aujourd’hui certains se baladent en short et chaussettes hautes blanches Fila. Normalement la cheville se découvre qu’en position assise.

Comme tu l’as sûrement déjà lu, un pantalon qui casse légèrement dans le bas est acceptable, de même qu’un pantalon un peu court. Le choix dépend du goût et de la mode.
Vu que dans le style classique la beauté est souvent dans le détail et la précision on peut quand même considérer un pantalon qui frôle juste la chaussure sans jamais casser comme la solution optimale. Difficile techniquement vu que le pantalon a tendance à glisser légèrement au fil du port : en général on opte pour du court afin de se laisser une marge et éviter que le pantalon ne finisse par casser de manière imprévue.

Certaines chaussures sont plus hautes que d’autres donc attention lors des essayages : un pantalon qui tombe juste sur mocassin peut être trop long sur derby ou richelieu.
Certaines chaussures sont plus hautes que d’autres donc attention lors des essayages : un pantalon qui tombe juste sur mocassin peut être trop long sur derby ou richelieu.
Sans bretelles le pantalon a tendance à changer de niveau. L’accessoire est indispensable pour un résultat de haute précision.
Sans bretelles le pantalon a tendance à changer de niveau. L’accessoire est indispensable pour un résultat de haute précision.

Les coupes du pantalon

Il y a deux visions de la coupe du pantalon en fonction du rôle laissé au corps dans la définition de la silhouette :
- La coupe ample/structurante : Le tissu laisse entièrement respirer la jambe et la forme du pantalon détermine aussi celle de la silhouette. C’est la vision classique/sartoriale.
- La coupe serrée/peu structurante ou non-structurante : Le tissu est proche du corps et c’est la jambe qui définit cette fois partiellement ou entièrement la silhouette. On peut parler de slim ou skinny pour reprendre la terminologie moderne.

Une coupe ample structure entièrement la jambe.
Une coupe ample structure entièrement la jambe.
Le principe du slim au contraire est de faire ressortir les fesses, les cuisses, les mollets, et parfois les burnes.
Le principe du slim au contraire est de faire ressortir les fesses, les cuisses, les mollets, et parfois les burnes.

Est-ce qu’on doit absolument se diriger vers le pantalon large si on prétend s’inscrire dans la mouvance sartoriale ? Contrairement à ce qu'on pourrait croire la pièce est minoritaire dans l’histoire. Les pinces, plis et autres standards classiques actuels sont des inventions du XXe siècle. Chez les premiers Dandys et même avant la Révolution les pantalons étaient plutôt serrés. Ce type de coupe a donc une légitimité historique, et la rejeter complètement reviendrait à résumer le classicisme aux années 20-30.
Le serré n’est pas en soi un problème, le vrai soucis est qu’il est généralisé aujourd’hui plutôt que de coexister avec les coupes amples, ce qui a pour conséquence que :
1° on applique des coupes slim ou skinny à des types de pantalons qui ne les supportent pas ;
2° on a une tendance naturelle à se diriger vers ces coupes même si on devrait l’éviter.

Les dandys du XIXe portaient des pantalons serrés. Illustration : Paul Rainer
Les dandys du XIXe portaient des pantalons serrés. Illustration : Paul Rainer
Les coupes amples sont un détail de l’histoire du pantalon.
Les coupes amples sont un détail de l’histoire du pantalon.

Ceci étant dit il faut quand même affirmer que la coupe ample a de gros avantages par rapport à la coupe ajustée :
1° elle donne de la stature et une allure robuste ;
2° elle gomme les défauts physiques ;
3° elle est beaucoup plus confortable.
Le seul avantage du serré est en définitive de mettre un beau corps en évidence (ce qui se défend).

Photo extraite de l’excellent article de Stiff-Collar sur la ligne des jambes. Un pantalon ample permet de garder une bonne ligne malgré une posture de jambes atypique ou un excès de gras, alors qu’elle serait complètement déformée avec une coupe ajustée.
Photo extraite de l’excellent article de Stiff-Collar sur la ligne des jambes. Un pantalon ample permet de garder une bonne ligne malgré une posture de jambes atypique ou un excès de gras, alors qu’elle serait complètement déformée avec une coupe ajustée.
A cause de la complexité des articulations du bas du corps les pantalons ont toujours causé problème. La solution la plus pratique est théoriquement de séparer la jambe en deux, avec une culotte et des bottes/bandes molletières par exemple (solution choisie par les militaires durant la Première Guerre Mondiale). Les pantalons du XIXe étaient réputés inconfortables, tout comme ceux du prêt-à-porter actuel, problème que résout le pantalon classique grâce à son amplitude généreuse.
A cause de la complexité des articulations du bas du corps les pantalons ont toujours causé problème. La solution la plus pratique est théoriquement de séparer la jambe en deux, avec une culotte et des bottes/bandes molletières par exemple (solution choisie par les militaires durant la Première Guerre Mondiale). Les pantalons du XIXe étaient réputés inconfortables, tout comme ceux du prêt-à-porter actuel, problème que résout le pantalon classique grâce à son amplitude généreuse.

La coupe du pantalon classique

Le pantalon classique, à plis ou à pinces, est sans aucun doute la pièce la plus caractéristique du style classique et de la mouvance sartoriale. Il est composé de plis ou de replis de tissu à l’avant et à l’arrière.

Tout le monde connait le « pantalon de costume » avec pli central avant et arrière. Quand les plis consistent en fait en des replis du tissu sur lui-même pincés dans la ceinture, on parle de pantalon « à pinces ».
Tout le monde connait le « pantalon de costume » avec pli central avant et arrière. Quand les plis consistent en fait en des replis du tissu sur lui-même pincés dans la ceinture, on parle de pantalon « à pinces ».

Ici pas le choix : la pièce est pensée pour être portée large, c’est-à-dire ne pas épouser les formes de la jambe.
Pour un même confort le pantalon a besoin de beaucoup plus de matière en position assise qu’en position debout. Si on place assez de matière pour la station assise, aucun problème d’aisance sur toute l’amplitude de mouvement, en revanche il y a un excès de matière debout qui peut être désavantageux pour la silhouette (assez fâcheux puisque c’est debout que le pantalon se remarque et a intérêt à être beau). C’est là que les plis interviennent : le tissu a assez de matière pour couvrir tout le mouvement mais se plie debout pour paraitre moins volumineux et désencombrer la jambe. Les pinces quant à elles permettent de rajouter encore plus de matière –et donc de confort- en conservant le même rendu.

Les pinces orientées vers l'intérieur sont dites pinces françaises. Pour celles vers l'extérieur (voir photo précédente) on parle de pinces italiennes.
Les pinces orientées vers l'intérieur sont dites pinces françaises. Pour celles vers l'extérieur (voir photo précédente) on parle de pinces italiennes.
Sur ce pantalon, pas de pinces mais un pli très marqué.
Sur ce pantalon, pas de pinces mais un pli très marqué.

Donc au niveau de la coupe, le pli avant doit être marqué, droit et continu, sans jamais s’effacer sur la cuisse, le pli arrière doit partir en ligne droite de la fesse jusqu’à la cheville, et les poches et pinces éventuelles doivent êtres fermées debout.

Pantalon Bernard Zins
Pantalon Bernard Zins
Si vous avez peur de porter un pantalon à pinces coupé ample, vous pouvez casser le côté "papy" avec une veste très décontractée et brut comme une veste en jean (veillez à ne pas trop la prendre ajustée afin de respecter les proportions du pantalon et ne pas donner l'impression que vous avez des hanches larges). Source : PermanentStyle.
Si vous avez peur de porter un pantalon à pinces coupé ample, vous pouvez casser le côté "papy" avec une veste très décontractée et brut comme une veste en jean (veillez à ne pas trop la prendre ajustée afin de respecter les proportions du pantalon et ne pas donner l'impression que vous avez des hanches larges). Source : PermanentStyle.
En hiver, vous pouvez oser le bombardier avec un col roulé rentré dans un pantalon taille haute en flanelle. Source : Milad Abedi.
En hiver, vous pouvez oser le bombardier avec un col roulé rentré dans un pantalon taille haute en flanelle. Source : Milad Abedi.

Si le pantalon marque les fesses ou les cuisses, les plis et pinces sont déjà ouverts en position debout, ce qui ruine à la fois leur esthétique et leur effet pratique.
Aujourd’hui on voit pas mal de pantalons à pli revenir dans des coupes slim voire skinny : les plis centraux s’effacent sur la cuisse alors que poches et pinces potentielles sont ouvertes en permanence. Certains vont défendre cette vision,  je trouve pour ma part le résultat grotesque : arborer de cette manière des éléments afonctionnels donne vraiment un rendu surfait, j’ai la même impression qu’en regardant un mauvais remake d’un film des années 80.

Ici la coupe est trop serrée. Les pinces sont ouvertes, le pli central est complètement plaqué sur la cuisse et perd son effet.
Ici la coupe est trop serrée. Les pinces sont ouvertes, le pli central est complètement plaqué sur la cuisse et perd son effet.
C’est d’un manque de matière dans la zone des fesses que vient souvent le problème : à partir de l’angle des fessiers le pantalon doit partir en ligne continue vers le bas. Les coupes slim sont plus serrées à la fois sur le haut de la cuisse (la base des fesses) et le tour de fesses en lui-même.
C’est d’un manque de matière dans la zone des fesses que vient souvent le problème : à partir de l’angle des fessiers le pantalon doit partir en ligne continue vers le bas. Les coupes slim sont plus serrées à la fois sur le haut de la cuisse (la base des fesses) et le tour de fesses en lui-même.
Illustration d’un manque de matière au niveau du fessier : le tissu plaque sur l’ischio et la ligne du pli part complètement de travers dans le bas.
Illustration d’un manque de matière au niveau du fessier : le tissu plaque sur l’ischio et la ligne du pli part complètement de travers dans le bas.
Si le pantalon tire trop au niveau du tour de fesse les poches s’ouvrent (comme ici à gauche) et créent un effet disgracieux.
Si le pantalon tire trop au niveau du tour de fesse les poches s’ouvrent (comme ici à gauche) et créent un effet disgracieux.

Quoiqu’il en soit les pantalons sartoriaux actuels sont quand même influencés par cette mode du serré. Ils tendent souvent à être le plus ajusté possible et à appuyer légèrement la forme des fesses (sans toutefois les marquer complètement comme sur du slim). Le rendu de profil n’est plus le même qu’il y a un siècle.

La règle classique veut que le pantalon parte en ligne droite jusqu’en bas depuis le point le plus large de la fesse. Le pli est fermé à l’arrière et forme ce qu’on appelle un « drapeau ». Comme sur la photo beaucoup de pantalons aujourd’hui tendent à être le plus ajustés possibles. Source : Zane Lim.
La règle classique veut que le pantalon parte en ligne droite jusqu’en bas depuis le point le plus large de la fesse. Le pli est fermé à l’arrière et forme ce qu’on appelle un « drapeau ». Comme sur la photo beaucoup de pantalons aujourd’hui tendent à être le plus ajustés possibles. Source : Zane Lim.

La coupe des autres pantalons

A côté des pantalons classiques à plis/pinces, on a ce qu’on appelle les pantalons « plats », qui concernent aujourd’hui les chinos et les jeans.
Traditionnellement le chino militaire était porté de manière assez large, mais on voit aussi des coupes plus serrées sur des vieilles photos de la Ivy League. Le jeans quant à lui est presque devenu un vêtement serré par nature.

Les pantalons plus casual comme les chinos ou jeans peuvent- et doivent- se porter plus près du corps en raison de l’absence de plis.
Les pantalons plus casual comme les chinos ou jeans peuvent- et doivent- se porter plus près du corps en raison de l’absence de plis.
Des étudiants de la Ivy League en chino.
Des étudiants de la Ivy League en chino.
Le jeans est une pièce qui revient de plus en plus dans les vestiaires sartoriaux malgré son origine workwear.
Le jeans est une pièce qui revient de plus en plus dans les vestiaires sartoriaux malgré son origine workwear.

Comme je l’ai développé le pantalon plat ajusté est une vraie régression technique et esthétique par rapport au pantalon classique. Il est moins confortable et ne va qu’à peu de personnes. Pourquoi tout le monde se trimballe en jeans skinny aujourd’hui alors ? On peut distinguer plusieurs facteurs :
- le pantalon plat est plus facile à entretenir
- la mode du serré s’est ancrée comme symbole de la libération sexuelle après 68, mode fitness
- resserrer les pantalons a été un avantage économique (plus facile et rapide à produire, plus facilement présentable, etc).
Vu cet état de fait c’est quasiment impossible de ne pas posséder quelques pantalons ajustés aujourd’hui. C’est même par le chino qu’on se lance dans le sartorialisme.

Ici le chino est suffisamment ajusté. Source : Bernard Zins.
Ici le chino est suffisamment ajusté. Source : Bernard Zins.
Cependant j’exclurais le serré total (le skinny) : trop passager, beaucoup trop éloigné des standards esthétiques classiques actuels.
Cependant j’exclurais le serré total (le skinny) : trop passager, beaucoup trop éloigné des standards esthétiques classiques actuels.
Le « fold appeal » est une pratique marketing qui consiste à rendre les vêtements présentables en étalage une fois pliés. Il a poussé les pantalons à devenir plus droits (et donc serrants) au niveau des hanches.
Le « fold appeal » est une pratique marketing qui consiste à rendre les vêtements présentables en étalage une fois pliés. Il a poussé les pantalons à devenir plus droits (et donc serrants) au niveau des hanches.

Pour des coupes ajustées type slim le pantalon devrait dans l’idéal suivre la cuisse sans trop la marquer de sorte à conserver une ligne logique et ne pas créer de tensions excessives. Un haut étroit sur la jambe couplé à un bas ample est disgracieux.

Les chinos plats paraissent bien fades par rapport aux pantalons à pinces. C’est pourtant une bonne pièce sur bien des aspects : elle est peu coûteuse, on en trouve partout dans une grande variété de coupes, elle est essentielle en débutant et joue ensuite un rôle de pantalon d’appoint. Source : Drake's.
Les chinos plats paraissent bien fades par rapport aux pantalons à pinces. C’est pourtant une bonne pièce sur bien des aspects : elle est peu coûteuse, on en trouve partout dans une grande variété de coupes, elle est essentielle en débutant et joue ensuite un rôle de pantalon d’appoint. Source : Drake's.
Les fesses sont marquées et la coupe suit la jambe de manière équilibrée : jamais le tissu n’est plaqué excessivement sur le corps.
Les fesses sont marquées et la coupe suit la jambe de manière équilibrée : jamais le tissu n’est plaqué excessivement sur le corps.
Grâce à leur toile épaisse les jeans peuvent être très ajustés tout en conservant un aspect assez uniforme. Source : @david_park07
Grâce à leur toile épaisse les jeans peuvent être très ajustés tout en conservant un aspect assez uniforme. Source : @david_park07

Si le pantalon plat n’a pas de plis ou de pinces il a quand même des poches qui s’ouvrent surtout lorsque celui-ci est trop ajusté. Une astuce dans ce cas est de choisir des chinos à poches cavalières plutôt qu’à poches en biais. Le montage horizontal empêche l’ouverture en cas de tension.

Au départ prévues pour être accessibles depuis un cheval monté, les poches « cavalières » sont également présentes sur la plupart des jeans. Elles sont un peu plus rares sur les chinos mais sont un choix judicieux pour éviter l’ouverture des poches debout.
Au départ prévues pour être accessibles depuis un cheval monté, les poches « cavalières » sont également présentes sur la plupart des jeans. Elles sont un peu plus rares sur les chinos mais sont un choix judicieux pour éviter l’ouverture des poches debout.
Sur un pantalon classique elles peuvent apporter une variation subtile. Source : Ambrosi / The Armoury.
Sur un pantalon classique elles peuvent apporter une variation subtile. Source : Ambrosi / The Armoury.

Enfin en cas d’excès de gras, de cuisses trop imposantes ou de posture de jambes « anormale » (arquées ou cogneuses) un pantalon ajusté se déforme et ne fait pas une belle jambe. Il vaut mieux dans ce cas privilégier les coupes larges.

Notez que plus le buste se verra structurer par le vêtement pour lui donner une allure athlétique et anguleuse (hauteur de boutonnage, forme des revers, forme de l'épaule, découpe du dos...) et plus le bas devra être ample afin de ne pas créer une disproportion. C'est aussi pour cette raison qu'un pantalon ample porté sans veste n'est pas forcément très esthétique car le bas apparaît disproportionné par rapport au buste (à moins d'être musclé, et dans ce cas là le réequilibrage visuel se fait naturellement, c'est également pour cette raison qu'une veste moins structurée sied mieux aux physiques athlétiques car autrement il y a surcompensation de carrure). A l'inverse, on peut être amateur de la silhouette "saint galmier" (bouteille de Badoit), qui reprend les codes esthétiques des vêtements à taille. La taille est serrée et les épaules étroites pour des manches amples et un bassin assez large mais la cuisse et le mollet sont également à l'étroit. Ce genre de silhouette est plutôt réservée à un homme petit et très mince, autrement elle apparaît vraiment grotesque.

Evitez d'associer une veste avec un chino ou jeans à coupe trop ajustée, le décalage de structure et d’amplitude peut créer une rupture trop importante dans la ligne de silhouette. Avec un pantalon plus large, la silhouette redevient équilibrée. Source : Giovanni D'Antonio.
Evitez d'associer une veste avec un chino ou jeans à coupe trop ajustée, le décalage de structure et d’amplitude peut créer une rupture trop importante dans la ligne de silhouette. Avec un pantalon plus large, la silhouette redevient équilibrée. Source : Giovanni D'Antonio.

L’ouverture de cheville

Reste à parler de l’ouverture de cheville.
La tendance aujourd’hui est d’avoir un bas de pantalon étroit, ce qui n’altère pas forcément le rendu d’ensemble. Par contre l’ouverture  de cheville sert à rétablir une harmonie avec la longueur des souliers. Un bas étroit avec un derby un peu long ou des grands pieds peut donne une allure de clown. Attention donc à moduler correctement l’ouverture en fonction des situations.

L’ouverture de cheville peut être plus ou moins étroite mais doit respecter une harmonie avec la chaussure et le haut du pantalon.
L’ouverture de cheville peut être plus ou moins étroite mais doit respecter une harmonie avec la chaussure et le haut du pantalon.
Le chino ne recouvre pas assez la chaussure pour supporter ce modèle. Le pied parait trop long.
Le chino ne recouvre pas assez la chaussure pour supporter ce modèle. Le pied parait trop long.
Si le pantalon est trop serré sur le haut (souvent au genou) le bas peut être déporté complètement vers l’arrière : dans ce cas la partie inférieure forme une sorte « d’éperon », le pantalon ne recouvre plus la chaussure mais est plaqué contre l’avant de la cheville. Le port de chaussures longues devient problématique car le bas du pantalon ne joue plus son rôle.
Si le pantalon est trop serré sur le haut (souvent au genou) le bas peut être déporté complètement vers l’arrière : dans ce cas la partie inférieure forme une sorte « d’éperon », le pantalon ne recouvre plus la chaussure mais est plaqué contre l’avant de la cheville. Le port de chaussures longues devient problématique car le bas du pantalon ne joue plus son rôle.

Conclusion

Il est délicat d’émettre une vérité générale concernant la coupe d'un pantalon même du point de vue des canons du genre. L'idéal est d'avoir une coupe respectueuse de votre morphologie (votre taille, votre corpulence, cuisses fines ou musclées, taille des pieds, fessiers prononcés ou non, posture...) et ensuite de chercher la cohérence. Par cohérence, nous entendons qu'une veste structurée (par exemple) s’accommode mieux d'un pantalon ample à pinces françaises dont le rendu est un peu bouffant. Si vous souhaitez des pinces sur un pantalon plus ajusté préférez les pinces italiennes, et si vous voulez un pantalon encore plus ajusté préférez le sans pince de crainte qu'elles ne s'ouvrent. Un pantalon casual supporte mieux les fantaisies de coupe et de matière qu'un pantalon formel. Sur un jean ou un chino, vous pouvez vous permettre de le faire couper assez court, de faire un revers à la main, le porter assez ajusté ou très ample... et le reste doit être cohérent, par exemple une veste totalement déstructurée coupée un peu plus courte que la norme si le pantalon est assez ajusté et que sa taille est naturelle-basse (une veste longue sied mieux à un pantalon taille haute). De la même façon, suivant la matière vous devez vous orienter vers telle ou telle coupe : un pantalon dans une matière lourde supporte mieux une coupe ample avec une longueur qui donne un beau cassant, alors qu'une coupe ajustée sera inconfortable et donnera un cassant disgracieux en forme de tire-bouchon. En revanche une matière fine supporte mieux une coupe ajustée et un feu de plancher voire une coupe assez courte (le cassant sera disgracieux avec une matière légère). De même, une paire de mocassins supporte bien mieux le pantalon coupé court car les deux sont associés à la décontraction estivale. Si vous comptez garder vos pantalons longtemps, essayez de rester proche des canons classiques au lieu de tendre vers les extrêmes qui seront plus marqués dans la mode de leur époque.

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