La Bonne Coupe 3 – Le pantalon : forme, amplitude, plis et longueur.

Après l’épisode sur la hauteur de la taille on continue avec les pantalons en abordant cette fois le point du tombé.
Qu’est-ce qu’on entend par « tombé » ? C’est l’allure générale que prend le tissu une fois porté : sa forme, son amplitude, ses plis et sa longueur.

À gauche, ce que l'on voit trop souvent, à droite, ce que l'on aimerait voir.
À gauche, ce que l'on voit trop souvent, à droite, ce que l'on aimerait voir.

Le tombé : une question de longueur avant tout

Pour un bon tombé la première idée est justement de permettre au pantalon de « tomber ». Le tissu doit pendre au lieu de s’écraser sur la chaussure en tirant la tronche, d’où l’importance de ne pas avoir un pantalon trop long.

Voilà un pantalon qui pend. Source : Spalla Korea.
Voilà un pantalon qui pend. Source : Spalla Korea.
Trop long le tissu s’affaisse sur lui-même et la jambe est déformée. Source : Flamby
Trop long le tissu s’affaisse sur lui-même et la jambe est déformée. Source : Flamby

Il est plutôt rare aujourd’hui de voir des pantalons trop longs comme c’était le cas il y a dix ans. On est passés globalement à l’extrême opposé avec des pantalons très courts qui dévoilent les chevilles, et c’est aussi vrai dans le milieu sartorial. Le second cas est mieux esthétiquement que le premier car le pantalon conserve un tombé, mais autant le trop long que le trop court tassent la silhouette.

Le pantalon trop long élargit la silhouette dans le bas alors qu’elle doit justement s’affiner à cet endroit pour conserver une projection en V. Le pantalon trop court réduit la hauteur perçue de la jambe.
Le pantalon trop long élargit la silhouette dans le bas alors qu’elle doit justement s’affiner à cet endroit pour conserver une projection en V. Le pantalon trop court réduit la hauteur perçue de la jambe.
Les crétins du Pitti se sentent subversifs en dévoilant leurs mi-bas jaunes sur 10cm alors qu’aujourd’hui certains se baladent en short et chaussettes hautes blanches Fila. Normalement la cheville se découvre qu’en position assise.
Les crétins du Pitti se sentent subversifs en dévoilant leurs mi-bas jaunes sur 10cm alors qu’aujourd’hui certains se baladent en short et chaussettes hautes blanches Fila. Normalement la cheville se découvre qu’en position assise.

Comme tu l’as sûrement déjà lu, un pantalon qui casse légèrement dans le bas est acceptable, de même qu’un pantalon un peu court. Le choix dépend du goût et de la mode.
Vu que dans le style classique la beauté est souvent dans le détail et la précision on peut quand même considérer un pantalon qui frôle juste la chaussure sans jamais casser comme la solution optimale. Difficile techniquement vu que le pantalon a tendance à glisser légèrement au fil du port : en général on opte pour du court afin de se laisser une marge et éviter que le pantalon ne finisse par casser de manière imprévue.

Certaines chaussures sont plus hautes que d’autres donc attention lors des essayages : un pantalon qui tombe juste sur mocassin peut être trop long sur derby ou richelieu.
Certaines chaussures sont plus hautes que d’autres donc attention lors des essayages : un pantalon qui tombe juste sur mocassin peut être trop long sur derby ou richelieu.
Sans bretelles le pantalon a tendance à changer de niveau. L’accessoire est indispensable pour un résultat de haute précision.
Sans bretelles le pantalon a tendance à changer de niveau. L’accessoire est indispensable pour un résultat de haute précision.

Les coupes du pantalon

Il y a deux visions de la coupe du pantalon en fonction du rôle laissé au corps dans la définition de la silhouette :
- La coupe ample/structurante : Le tissu laisse entièrement respirer la jambe et la forme du pantalon détermine aussi celle de la silhouette. C’est la vision classique/sartoriale.
- La coupe serrée/peu structurante ou non-structurante : Le tissu est proche du corps et c’est la jambe qui définit cette fois partiellement ou entièrement la silhouette. On peut parler de slim ou skinny pour reprendre la terminologie moderne.

Une coupe ample structure entièrement la jambe.
Une coupe ample structure entièrement la jambe.
Le principe du slim au contraire est de faire ressortir les fesses, les cuisses, les mollets, et parfois les burnes.
Le principe du slim au contraire est de faire ressortir les fesses, les cuisses, les mollets, et parfois les burnes.

Est-ce qu’on doit absolument se diriger vers le pantalon large si on prétend s’inscrire dans la mouvance sartoriale ? Contrairement à ce qu'on pourrait croire la pièce est minoritaire dans l’histoire. Les pinces, plis et autres standards classiques actuels sont des inventions du XXe siècle. Chez les premiers Dandys et même avant la Révolution les pantalons étaient plutôt serrés. Ce type de coupe a donc une légitimité historique, et la rejeter complètement reviendrait à résumer le classicisme aux années 20-30.
Le serré n’est pas en soi un problème, le vrai soucis est qu’il est généralisé aujourd’hui plutôt que de coexister avec les coupes amples, ce qui a pour conséquence que :
1° on applique des coupes slim ou skinny à des types de pantalons qui ne les supportent pas ;
2° on a une tendance naturelle à se diriger vers ces coupes même si on devrait l’éviter.

Les dandys du XIXe portaient des pantalons serrés. Illustration : Paul Rainer
Les dandys du XIXe portaient des pantalons serrés. Illustration : Paul Rainer
Les coupes amples sont un détail de l’histoire du pantalon.
Les coupes amples sont un détail de l’histoire du pantalon.

Ceci étant dit il faut quand même affirmer que la coupe ample a de gros avantages par rapport à la coupe ajustée :
1° elle donne de la stature et une allure robuste ;
2° elle gomme les défauts physiques ;
3° elle est beaucoup plus confortable.
Le seul avantage du serré est en définitive de mettre un beau corps en évidence (ce qui se défend).

Photo extraite de l’excellent article de Stiff-Collar sur la ligne des jambes. Un pantalon ample permet de garder une bonne ligne malgré une posture de jambes atypique ou un excès de gras, alors qu’elle serait complètement déformée avec une coupe ajustée.
Photo extraite de l’excellent article de Stiff-Collar sur la ligne des jambes. Un pantalon ample permet de garder une bonne ligne malgré une posture de jambes atypique ou un excès de gras, alors qu’elle serait complètement déformée avec une coupe ajustée.
A cause de la complexité des articulations du bas du corps les pantalons ont toujours causé problème. La solution la plus pratique est théoriquement de séparer la jambe en deux, avec une culotte et des bottes/bandes molletières par exemple (solution choisie par les militaires durant la Première Guerre Mondiale). Les pantalons du XIXe étaient réputés inconfortables, tout comme ceux du prêt-à-porter actuel, problème que résout le pantalon classique grâce à son amplitude généreuse.
A cause de la complexité des articulations du bas du corps les pantalons ont toujours causé problème. La solution la plus pratique est théoriquement de séparer la jambe en deux, avec une culotte et des bottes/bandes molletières par exemple (solution choisie par les militaires durant la Première Guerre Mondiale). Les pantalons du XIXe étaient réputés inconfortables, tout comme ceux du prêt-à-porter actuel, problème que résout le pantalon classique grâce à son amplitude généreuse.

La coupe du pantalon classique

Le pantalon classique, à plis ou à pinces, est sans aucun doute la pièce la plus caractéristique du style classique et de la mouvance sartoriale. Il est composé de plis ou de replis de tissu à l’avant et à l’arrière.

Tout le monde connait le « pantalon de costume » avec pli central avant et arrière. Quand les plis consistent en fait en des replis du tissu sur lui-même pincés dans la ceinture, on parle de pantalon « à pinces ».
Tout le monde connait le « pantalon de costume » avec pli central avant et arrière. Quand les plis consistent en fait en des replis du tissu sur lui-même pincés dans la ceinture, on parle de pantalon « à pinces ».

Ici pas le choix : la pièce est pensée pour être portée large, c’est-à-dire ne pas épouser les formes de la jambe.
Pour un même confort le pantalon a besoin de beaucoup plus de matière en position assise qu’en position debout. Si on place assez de matière pour la station assise, aucun problème d’aisance sur toute l’amplitude de mouvement, en revanche il y a un excès de matière debout qui peut être désavantageux pour la silhouette (assez fâcheux puisque c’est debout que le pantalon se remarque et a intérêt à être beau). C’est là que les plis interviennent : le tissu a assez de matière pour couvrir tout le mouvement mais se plie debout pour paraitre moins volumineux et désencombrer la jambe. Les pinces quant à elles permettent de rajouter encore plus de matière –et donc de confort- en conservant le même rendu.

Les pinces orientées vers l'intérieur sont dites pinces françaises. Pour celles vers l'extérieur (voir photo précédente) on parle de pinces italiennes.
Les pinces orientées vers l'intérieur sont dites pinces françaises. Pour celles vers l'extérieur (voir photo précédente) on parle de pinces italiennes.
Sur ce pantalon, pas de pinces mais un pli très marqué.
Sur ce pantalon, pas de pinces mais un pli très marqué.

Donc au niveau de la coupe, le pli avant doit être marqué, droit et continu, sans jamais s’effacer sur la cuisse, le pli arrière doit partir en ligne droite de la fesse jusqu’à la cheville, et les poches et pinces éventuelles doivent êtres fermées debout.

Pantalon Bernard Zins
Pantalon Bernard Zins
Si vous avez peur de porter un pantalon à pinces coupé ample, vous pouvez casser le côté "papy" avec une veste très décontractée et brut comme une veste en jean (veillez à ne pas trop la prendre ajustée afin de respecter les proportions du pantalon et ne pas donner l'impression que vous avez des hanches larges). Source : PermanentStyle.
Si vous avez peur de porter un pantalon à pinces coupé ample, vous pouvez casser le côté "papy" avec une veste très décontractée et brut comme une veste en jean (veillez à ne pas trop la prendre ajustée afin de respecter les proportions du pantalon et ne pas donner l'impression que vous avez des hanches larges). Source : PermanentStyle.
En hiver, vous pouvez oser le bombardier avec un col roulé rentré dans un pantalon taille haute en flanelle. Source : Milad Abedi.
En hiver, vous pouvez oser le bombardier avec un col roulé rentré dans un pantalon taille haute en flanelle. Source : Milad Abedi.

Si le pantalon marque les fesses ou les cuisses, les plis et pinces sont déjà ouverts en position debout, ce qui ruine à la fois leur esthétique et leur effet pratique.
Aujourd’hui on voit pas mal de pantalons à pli revenir dans des coupes slim voire skinny : les plis centraux s’effacent sur la cuisse alors que poches et pinces potentielles sont ouvertes en permanence. Certains vont défendre cette vision,  je trouve pour ma part le résultat grotesque : arborer de cette manière des éléments afonctionnels donne vraiment un rendu surfait, j’ai la même impression qu’en regardant un mauvais remake d’un film des années 80.

Ici la coupe est trop serrée. Les pinces sont ouvertes, le pli central est complètement plaqué sur la cuisse et perd son effet.
Ici la coupe est trop serrée. Les pinces sont ouvertes, le pli central est complètement plaqué sur la cuisse et perd son effet.
C’est d’un manque de matière dans la zone des fesses que vient souvent le problème : à partir de l’angle des fessiers le pantalon doit partir en ligne continue vers le bas. Les coupes slim sont plus serrées à la fois sur le haut de la cuisse (la base des fesses) et le tour de fesses en lui-même.
C’est d’un manque de matière dans la zone des fesses que vient souvent le problème : à partir de l’angle des fessiers le pantalon doit partir en ligne continue vers le bas. Les coupes slim sont plus serrées à la fois sur le haut de la cuisse (la base des fesses) et le tour de fesses en lui-même.
Illustration d’un manque de matière au niveau du fessier : le tissu plaque sur l’ischio et la ligne du pli part complètement de travers dans le bas.
Illustration d’un manque de matière au niveau du fessier : le tissu plaque sur l’ischio et la ligne du pli part complètement de travers dans le bas.
Si le pantalon tire trop au niveau du tour de fesse les poches s’ouvrent (comme ici à gauche) et créent un effet disgracieux.
Si le pantalon tire trop au niveau du tour de fesse les poches s’ouvrent (comme ici à gauche) et créent un effet disgracieux.

Quoiqu’il en soit les pantalons sartoriaux actuels sont quand même influencés par cette mode du serré. Ils tendent souvent à être le plus ajusté possible et à appuyer légèrement la forme des fesses (sans toutefois les marquer complètement comme sur du slim). Le rendu de profil n’est plus le même qu’il y a un siècle.

La règle classique veut que le pantalon parte en ligne droite jusqu’en bas depuis le point le plus large de la fesse. Le pli est fermé à l’arrière et forme ce qu’on appelle un « drapeau ». Comme sur la photo beaucoup de pantalons aujourd’hui tendent à être le plus ajustés possibles. Source : Zane Lim.
La règle classique veut que le pantalon parte en ligne droite jusqu’en bas depuis le point le plus large de la fesse. Le pli est fermé à l’arrière et forme ce qu’on appelle un « drapeau ». Comme sur la photo beaucoup de pantalons aujourd’hui tendent à être le plus ajustés possibles. Source : Zane Lim.

La coupe des autres pantalons

A côté des pantalons classiques à plis/pinces, on a ce qu’on appelle les pantalons « plats », qui concernent aujourd’hui les chinos et les jeans.
Traditionnellement le chino militaire était porté de manière assez large, mais on voit aussi des coupes plus serrées sur des vieilles photos de la Ivy League. Le jeans quant à lui est presque devenu un vêtement serré par nature.

Les pantalons plus casual comme les chinos ou jeans peuvent- et doivent- se porter plus près du corps en raison de l’absence de plis.
Les pantalons plus casual comme les chinos ou jeans peuvent- et doivent- se porter plus près du corps en raison de l’absence de plis.
Des étudiants de la Ivy League en chino.
Des étudiants de la Ivy League en chino.
Le jeans est une pièce qui revient de plus en plus dans les vestiaires sartoriaux malgré son origine workwear.
Le jeans est une pièce qui revient de plus en plus dans les vestiaires sartoriaux malgré son origine workwear.

Comme je l’ai développé le pantalon plat ajusté est une vraie régression technique et esthétique par rapport au pantalon classique. Il est moins confortable et ne va qu’à peu de personnes. Pourquoi tout le monde se trimballe en jeans skinny aujourd’hui alors ? On peut distinguer plusieurs facteurs :
- le pantalon plat est plus facile à entretenir
- la mode du serré s’est ancrée comme symbole de la libération sexuelle après 68, mode fitness
- resserrer les pantalons a été un avantage économique (plus facile et rapide à produire, plus facilement présentable, etc).
Vu cet état de fait c’est quasiment impossible de ne pas posséder quelques pantalons ajustés aujourd’hui. C’est même par le chino qu’on se lance dans le sartorialisme.

Ici le chino est suffisamment ajusté. Source : Bernard Zins.
Ici le chino est suffisamment ajusté. Source : Bernard Zins.
Cependant j’exclurais le serré total (le skinny) : trop passager, beaucoup trop éloigné des standards esthétiques classiques actuels.
Cependant j’exclurais le serré total (le skinny) : trop passager, beaucoup trop éloigné des standards esthétiques classiques actuels.
Le « fold appeal » est une pratique marketing qui consiste à rendre les vêtements présentables en étalage une fois pliés. Il a poussé les pantalons à devenir plus droits (et donc serrants) au niveau des hanches.
Le « fold appeal » est une pratique marketing qui consiste à rendre les vêtements présentables en étalage une fois pliés. Il a poussé les pantalons à devenir plus droits (et donc serrants) au niveau des hanches.

Pour des coupes ajustées type slim le pantalon devrait dans l’idéal suivre la cuisse sans trop la marquer de sorte à conserver une ligne logique et ne pas créer de tensions excessives. Un haut étroit sur la jambe couplé à un bas ample est disgracieux.

Les chinos plats paraissent bien fades par rapport aux pantalons à pinces. C’est pourtant une bonne pièce sur bien des aspects : elle est peu coûteuse, on en trouve partout dans une grande variété de coupes, elle est essentielle en débutant et joue ensuite un rôle de pantalon d’appoint. Source : Drake's.
Les chinos plats paraissent bien fades par rapport aux pantalons à pinces. C’est pourtant une bonne pièce sur bien des aspects : elle est peu coûteuse, on en trouve partout dans une grande variété de coupes, elle est essentielle en débutant et joue ensuite un rôle de pantalon d’appoint. Source : Drake's.
Les fesses sont marquées et la coupe suit la jambe de manière équilibrée : jamais le tissu n’est plaqué excessivement sur le corps.
Les fesses sont marquées et la coupe suit la jambe de manière équilibrée : jamais le tissu n’est plaqué excessivement sur le corps.
Grâce à leur toile épaisse les jeans peuvent être très ajustés tout en conservant un aspect assez uniforme. Source : @david_park07
Grâce à leur toile épaisse les jeans peuvent être très ajustés tout en conservant un aspect assez uniforme. Source : @david_park07

Si le pantalon plat n’a pas de plis ou de pinces il a quand même des poches qui s’ouvrent surtout lorsque celui-ci est trop ajusté. Une astuce dans ce cas est de choisir des chinos à poches cavalières plutôt qu’à poches en biais. Le montage horizontal empêche l’ouverture en cas de tension.

Au départ prévues pour être accessibles depuis un cheval monté, les poches « cavalières » sont également présentes sur la plupart des jeans. Elles sont un peu plus rares sur les chinos mais sont un choix judicieux pour éviter l’ouverture des poches debout.
Au départ prévues pour être accessibles depuis un cheval monté, les poches « cavalières » sont également présentes sur la plupart des jeans. Elles sont un peu plus rares sur les chinos mais sont un choix judicieux pour éviter l’ouverture des poches debout.
Sur un pantalon classique elles peuvent apporter une variation subtile. Source : Ambrosi / The Armoury.
Sur un pantalon classique elles peuvent apporter une variation subtile. Source : Ambrosi / The Armoury.

Enfin en cas d’excès de gras, de cuisses trop imposantes ou de posture de jambes « anormale » (arquées ou cogneuses) un pantalon ajusté se déforme et ne fait pas une belle jambe. Il vaut mieux dans ce cas privilégier les coupes larges.

Notez que plus le buste se verra structurer par le vêtement pour lui donner une allure athlétique et anguleuse (hauteur de boutonnage, forme des revers, forme de l'épaule, découpe du dos...) et plus le bas devra être ample afin de ne pas créer une disproportion. C'est aussi pour cette raison qu'un pantalon ample porté sans veste n'est pas forcément très esthétique car le bas apparaît disproportionné par rapport au buste (à moins d'être musclé, et dans ce cas là le réequilibrage visuel se fait naturellement, c'est également pour cette raison qu'une veste moins structurée sied mieux aux physiques athlétiques car autrement il y a surcompensation de carrure). A l'inverse, on peut être amateur de la silhouette "saint galmier" (bouteille de Badoit), qui reprend les codes esthétiques des vêtements à taille. La taille est serrée et les épaules étroites pour des manches amples et un bassin assez large mais la cuisse et le mollet sont également à l'étroit. Ce genre de silhouette est plutôt réservée à un homme petit et très mince, autrement elle apparaît vraiment grotesque.

Evitez d'associer une veste avec un chino ou jeans à coupe trop ajustée, le décalage de structure et d’amplitude peut créer une rupture trop importante dans la ligne de silhouette. Avec un pantalon plus large, la silhouette redevient équilibrée. Source : Giovanni D'Antonio.
Evitez d'associer une veste avec un chino ou jeans à coupe trop ajustée, le décalage de structure et d’amplitude peut créer une rupture trop importante dans la ligne de silhouette. Avec un pantalon plus large, la silhouette redevient équilibrée. Source : Giovanni D'Antonio.

L’ouverture de cheville

Reste à parler de l’ouverture de cheville.
La tendance aujourd’hui est d’avoir un bas de pantalon étroit, ce qui n’altère pas forcément le rendu d’ensemble. Par contre l’ouverture  de cheville sert à rétablir une harmonie avec la longueur des souliers. Un bas étroit avec un derby un peu long ou des grands pieds peut donne une allure de clown. Attention donc à moduler correctement l’ouverture en fonction des situations.

L’ouverture de cheville peut être plus ou moins étroite mais doit respecter une harmonie avec la chaussure et le haut du pantalon.
L’ouverture de cheville peut être plus ou moins étroite mais doit respecter une harmonie avec la chaussure et le haut du pantalon.
Le chino ne recouvre pas assez la chaussure pour supporter ce modèle. Le pied parait trop long.
Le chino ne recouvre pas assez la chaussure pour supporter ce modèle. Le pied parait trop long.
Si le pantalon est trop serré sur le haut (souvent au genou) le bas peut être déporté complètement vers l’arrière : dans ce cas la partie inférieure forme une sorte « d’éperon », le pantalon ne recouvre plus la chaussure mais est plaqué contre l’avant de la cheville. Le port de chaussures longues devient problématique car le bas du pantalon ne joue plus son rôle.
Si le pantalon est trop serré sur le haut (souvent au genou) le bas peut être déporté complètement vers l’arrière : dans ce cas la partie inférieure forme une sorte « d’éperon », le pantalon ne recouvre plus la chaussure mais est plaqué contre l’avant de la cheville. Le port de chaussures longues devient problématique car le bas du pantalon ne joue plus son rôle.

Conclusion

Il est délicat d’émettre une vérité générale concernant la coupe d'un pantalon même du point de vue des canons du genre. L'idéal est d'avoir une coupe respectueuse de votre morphologie (votre taille, votre corpulence, cuisses fines ou musclées, taille des pieds, fessiers prononcés ou non, posture...) et ensuite de chercher la cohérence. Par cohérence, nous entendons qu'une veste structurée (par exemple) s’accommode mieux d'un pantalon ample à pinces françaises dont le rendu est un peu bouffant. Si vous souhaitez des pinces sur un pantalon plus ajusté préférez les pinces italiennes, et si vous voulez un pantalon encore plus ajusté préférez le sans pince de crainte qu'elles ne s'ouvrent. Un pantalon casual supporte mieux les fantaisies de coupe et de matière qu'un pantalon formel. Sur un jean ou un chino, vous pouvez vous permettre de le faire couper assez court, de faire un revers à la main, le porter assez ajusté ou très ample... et le reste doit être cohérent, par exemple une veste totalement déstructurée coupée un peu plus courte que la norme si le pantalon est assez ajusté et que sa taille est naturelle-basse (une veste longue sied mieux à un pantalon taille haute). De la même façon, suivant la matière vous devez vous orienter vers telle ou telle coupe : un pantalon dans une matière lourde supporte mieux une coupe ample avec une longueur qui donne un beau cassant, alors qu'une coupe ajustée sera inconfortable et donnera un cassant disgracieux en forme de tire-bouchon. En revanche une matière fine supporte mieux une coupe ajustée et un feu de plancher voire une coupe assez courte (le cassant sera disgracieux avec une matière légère). De même, une paire de mocassins supporte bien mieux le pantalon coupé court car les deux sont associés à la décontraction estivale. Si vous comptez garder vos pantalons longtemps, essayez de rester proche des canons classiques au lieu de tendre vers les extrêmes qui seront plus marqués dans la mode de leur époque.

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On continue avec les pantalons en abordant cette fois le point du tombé, c'est à dire l'allure générale que prend le tissu : sa forme, son amplitude, ses plis et sa longueur.

 

22 réflexions au sujet de “La Bonne Coupe 3 – Le pantalon : forme, amplitude, plis et longueur.”

  1. Hello
    Encore un article intéressant, merci.
    Une question : je n’ai pas bien compris pourquoi les pinces française seraient plus adaptée à une coupe ample et les pinces italiennes à une coupe ajustée.
    Je ne vois pas bien la différence technique entre les deux. Je n’y vois qu’une différence esthétique.
    A bientôt 🙂

    Répondre
  2. Bonjour,
    Super article comme d’habitude toujours juste sur le fond et un peu subversif sur la forme.
    Une simple question, auriez vous un conseil pour apprécier le sartorialisme lorsque l’on est jeune et que notre contexte ne permet pas le port de veste sport ou costume ?
    Merci

    Répondre
  3. Bonjour,
    A quand un article et des conseils sur le sartorialisme pour les hommes mûrs qui n’ont (hélas !) plus la taille mannequin ?

    Répondre
  4. Merci pour cette série d’articles consacrés au pantalon, qui reste bien souvent le parent pauvre de l’industrie et des articles de blogs.

    A titre personnel, cela fait quelques années que je ne porte plus que des pantalons taille haute, avec un peu d’ampleur et des pinces doubles, malgré la quasi inexistence de ces derniers dans le prêt-à-porter actuel (merci à Luxire et aux friperies, sans qui je serais sans doute obligé de me promener cul-nu).

    Il est étonnant en effet de voir comment les pantalons étroits à taille basse ont submergé le vestiaire masculin, et ce en très peu de temps entre la fin des années 90 et aujourd’hui ; sociologiquement, on sait que la plupart des hommes ont une vision et des habitudes d’achat plutôt pratique et pragmatique en terme de vêtements, et privilégient souvent la fonction, parfois au détriment du style d’ailleurs. Hors, les pantalons étroits et les tailles basses sont aux antipodes du pratique, et du confortable.

    Un exemple que je reprends souvent lorsque je dois justifier auprès d’autrui le port de mes tailles hautes est celui du côté pratique (mes interlocuteurs restent plutôt sceptique si j’aborde le côté plus esthétique de la chose) : les activités qui nécessitent de l’aisance se font avec des tailles hautes. Il suffit de regarder les pantalons de treillis de nos militaires, les shorts des boxeurs et des surfeurs, les pantalons dédiés à la danse, etc.

    Un autre exemple frappant, qui permet de mesurer à quel point les pantalons ont perdu en hauteur et en volume ces dernières années est de comparer les mesures d’un ancien pantalon à un pantalon actuel. Je possède plusieurs chino datant des années 50, en taille 25 (taille militaire, qui correspond à une taille française 44 aujourd’hui). La demi fourche avant mesure 35 cm. En comparaison, un chino Uniqlo coupe droite (la plus large proposée par la marque) en taille 34 US possède une demi fourche avant de… seulement 26 cm ! La différence est absolument énorme ! Pour ma part, je fais couper mes pantalons Luxire avec un montant avant de 31 cm, qui me satisfait pleinement, bien que j’hésite à rajouter un cm supplémentaire.

    Enfin, comme vous le rappelez très justement, tout est une question de morphologie, et de cohérence dans la construction des tenues. Je n’ai dans le fond rien contre les tailles basses et les coupes étroites. Ce qui me pose problème, c’est lorsque l’ensemble de l’industrie ne propose que et uniquement que cette coupe, qui ne va finalement qu’à peu de monde.

    Répondre
  5. Pour vous assurer de porter la bonne longueur de manches de chemise, d boutonnez une manche et placez votre bras le long du corps. Pour une longueur de manche optimale, la manche doit arriver 2 cm au-dessus de la base du pouce.

    Répondre
  6. Article instructif, je suis petit et mince avec un très léger embonpoint, j’ai beaucoup de difficultés à trouver un pantalon qui tombe bien.
    Par exemple très difficile de trouver un chino donc la coupe m’avantage. Bizarrement celui-ci https://www.sartorialisme.com/wp-content/uploads/2019/07/LBC3-1024×951.jpg légèrement sur taillé me convient, près du corps mais pas serré, taille convenable, fourche à la bonne hauteur, manque juste un cm à la cheville. J’ai essayé beaucoup d’autres chinos, mais je ne retrouve pas l’aisance de celui-ci.

    Répondre
  7. Excellent article, excellent blog, j’ai enfin pu me mettre à comprendre pourquoi la plupart de mes pantalons en coupes carottes se mettaient à casser comme de la merde en dessous des genoux, ruinant ainsi la continuité du tomber de la jambe.

    Répondre
  8. Bonjour

    Je possède deux pantalons a pince de chez Luxire que j’ai fait légèrement retoucher, mais le problème est qu’ils ne ‘pendent’ pas droit, deux vilaines poches se forment au niveaux des genoux (un peu comme sur la photo de Milad Abedi avec le bombardier). Est ce parce que mes genoux sont de travers (ils le sont un peu), ou bien une solution existe t-elle?

    Merci pour votre aide!

    Répondre
  9. Bonjour, je suis un femme et je souhaite porter un pantalon à princesse j hesite à faire couper un ourlet. Car avec différentes hauteurs de talon cela donne différemment, puis je le porter en ourlets pliés. Quelle bonne longueur. Je précise que c est un pantalon à pinces chevrons en lainage. Merci
    Stéphanie

    Répondre
  10. Bonjour, je suis une femme et je souhaite porter un pantalon à pinces masculin j hesite à faire couper un ourlet. Car avec différentes hauteurs de talon cela donne différemment, puis je le porter en ourlets pliés. Quelle bonne longueur. Je précise que c est un pantalon à pinces chevrons en lainage. Merci
    Stéphanie

    Répondre
  11. Bonjour, excellent article comme d’habitude !
    J’ai une question concernant la longueur du pantalon : Je n’ai qu’un jean pour pouvoir prendre des mesures et je voulais savoir si ça pouvait permettre d’avoir des pantalons classique (à pince) à la bonne longueur ou si j’aurais une mauvaise surprise ?

    C’est surtout la longueur d’entrejambe que je dois mesurer mais j’ai lu que les jeans et pantalons de ville n’avait pas la même fourche, donc qu’il valait mieux éviter le jean pour cette mesure.

    Je précise que j’ai un jean coupe droite, ayant la même longueur de fourche avant que le pantalon à pince simple qui m’intéresse. Ainsi que la même largueur de demi-cuisse.

    Je vous remercie d’avance !

    Répondre
    • Bonjour,

      Ça n’est pas l’idéal mais ça peut être suffisant, il est difficile de répondre de façon abstraite.
      De toute façon il y aura quelques tâtonnements avant de trouver un pantalon coupe droite/taille haut qui convienne.

      Répondre
  12. Merci beaucoup pour votre article qui met du baume au cœur. J’ai un certain âge et désespérais d’un retour à l’élégance qui suppose, pour moi, le respect des proportions, de soi ( et des autres par la même occasion), la connaissance de sa morphologie, le goût des belles matières, couleurs et coupes, d’une recherche de beaux maintien, démarche et prestance, ce qui ne peut que mettre en valeur le bel habit et donc l’individu.
    Enfin l’arrêt d’une dictature de la pensée et du goût, le plaisir de regarder autour de soi et goûter la beauté, l’originalité et la personnalité d’autrui.
    Merci encore, jeunes gens, de l’espoir de ce retour .
    Bien à vous
    Laurence

    Répondre
  13. je suis tout à fait d’accord avec ces articles que j’aurai pu écrire ;
    en résumé, personnes de plus de 70 ans allez vous rhabiller chez « machin » ou ressortir les vêtements de papy….
    Vous n’intéressez plus le monde de la mode!!!!

    Répondre

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